Drapeaux de prière plongeant sur la vallée au soleil couchant

Mac Leod Ganj, havre de paix au coeur de l’Himalaya

Après le rendez-vous avec Myrada, nous rejoignons la gare routière pour prendre le bus de Mac Leod Ganj, un petit village au nord du pays, dans l’Himalaya. Pour notre plus grand bonheur, les bus sont beaucoup plus confortables qu’au Burkina Faso : avec un peu de chance, nous devrions pouvoir dormir ! Marlène comprend vite qu’elle n’aurait pas dû se réjouir trop vite. Après avoir essayé désespérément de dormir avec une échelle contre la tête, la barre de fer centrale du plafond lui tombe dessus...et quelques instants plus tard c’est au tour du sac de voyage du passager au-dessus de lui défoncer le genou.
Nous arrivons sur les coups de 8h00 à Mac Leod Ganj, relativement épuisées...à peine sommes-nous sorties du bus qu’une dizaine de personnes se jettent sur nous, nous assaillant de « Yes Mam, you want a room ? Good price!”, en nous tendant leurs cartes de visite.

Ne nous avait-on pas dit que Mac Leod Ganj était un village paisible ? Nous parvenons à les esquiver et partons à la recherche de Tibetan Women’s Association, avec qui nous avons rendez-vous. Nous regardons le plan plus que sommaire à l’entrée du village et optons sans trop de conviction pour la première à gauche. Au bout de quelques centaines de mètres en montée, nous nous retrouvons au beau milieu d’arbres, de singes, et aucune habitation en vue...nous retournons donc au centre pour demander notre chemin. Grâce aux indications reçues à chacune de nos demandes, nous parvenons à parcourir en long et en large le même chemin (1,5 km) plus de 4 fois ! Un peu exaspérées et nos sacs de voyage toujours sur le dos, nous arrivons enfin à bon port. Nous rencontrons la responsable de la communication internationale. Après nous avoir parlé du travail de l’association en général, elle commence à nous parler de la vie du peuple tibétain et plus particulièrement des tortures subies par les prisonniers tibétains en Chine...des supplices qu’on ne saurait même pas imaginer. Au regard presque rempli de larmes et au timbre de sa voix, nous devinons que des proches à elle ont dû en être victimes (voir interview). En France, je m’étais toujours sentie solidaire du peuple tibétain et de son gouvernement en exil, mais jamais je n’avais imaginé la réalité des faits : ils sont privés de toutes libertés, capturés et emprisonnés à vie en violation de tous les droits humains, torturés, abattus lorsqu’ils essaient de s’enfuir en Inde. Leur culture, pourtant si riche et qui séduit tant de personnes de part le monde risque d’être anéantie. Etre ici, au coeur du Tibet en exil avec cette association qui lutte pour les droits de son peuple bafoués par la Chine fait prendre à cette cause une toute autre dimension...
Elle nous explique ensuite qu’elle est un peu occupée par les préparatifs du meeting du lendemain, un meeting au grand temple pour la libération de Tenzin Delek, et nous invite à la rejoindre le lendemain au stand qu’elle tiendra sur la place du village.
Nous posons nos affaires dans un petit hôtel où elle nous conduit et partons visiter les cascades. Pour cela, il nous faut bien sûr emprunter le même chemin de 1,5 km, que nous connaissons désormais par coeur ! La cascade, en période sèche, est un peu maigrichonne, mais nous profitons d’une belle vue sur les montagnes environnantes. Nous nous reposons quelques instants, profitant de la fraîcheur de la cascade puis à notre réveil contemplons le spectacle des moines bouddhistes, accompagnés de quelques enfants, venus laver leur linge dans la rivière. Nous partons ensuite à la recherche d’un bon point de vue pour le coucher de soleil avant de passer une petite soirée tranquille dans un restaurant tibétain. La vie est vraiment paisible à Mac Leod Ganj !
Nous rejoignons le lendemain matin Ling, qui nous confie la tâche d’annoncer le meeting dans le village. Nous arpentons donc les rues, à renfort de tracts, afin de mobiliser un maximum de personnes, avant de nous rendre au temple du Dalaï Lama.  Mis à part quelques passages en anglais, la quasi totalité du discours se fait en tibétain, ce qui ne rend pas facile la compréhension ! Malgré tout, la barrière de la langue ne nous empêche pas d’être saisies par des moments forts, comme ce moment où tous nous avons porté devant notre visage un portrait de Tenzin, accompagnant ce geste d’une minute de silence...une protestation muette contre une injustice. En 2002, lors d’un procès privé, Tenzin Delek et un autre religieux tibétain ont été accusés sans aucune preuve d’attentats terroristes (un attentat à la bombe n’ayant d’ailleurs fait aucun mort) et condamnés à mort : la seule raison pour laquelle Tenzin a été impliqué dans cette affaire est en effet sa photo retrouvée chez l’autre religieux, présumé coupable par la police. Tenzin était depuis quelques temps dans la ligne de mire des autorités chinoises car il tentait de préserver la culture tibétaine malgré l’occupation chinoise en construisant des écoles, des monastères et en défendant la langue tibétaine...très aimé par le peuple, les tentatives des autorités chinoises pour l’arrêter avaient jusque là échoué. A peine un mois après la condamnation, l’autre accusé a été exécuté tandis que l’exécution de Tenzin a été suspendue sous la pression internationale. Les autorités internationales ont exigé la révision de la peine, aujourd’hui transformée en réclusion à perpétuité. Les tibétains espèrent maintenant pouvoir obtenir son relâchement.
Pendant la conférence, une phrase du discours adressée aux étrangers m’a marquée :
« Grâce à sa sainteté le Dalaï Lama, la culture tibétaine s’est fait connaître de part le monde. Beaucoup se passionnent pour notre culture, et un imaginaire s’est construit autour de celle-ci, certains se sentant concernés par notre cause parce qu’ils pensent que nous sommes un peuple spécial. Mais nous ne sommes que de simples êtres humains et c’est en tant qu’êtres humains dont les droits sont bafoués que nous avons besoin de votre aide. Aidez-nous à jouir comme vous de nos libertés et droits fondamentaux. »
A la fin de la conférence, nous empruntons la promenade qui borde le temple. Les bouddhistes méditent le long de ce chemin au lever du jour et à la tombée de la nuit, faisant pivoter entre leurs mains leur rouleau à prière. De part et d’autre du chemin flottent des drapeaux de prières déposés par les pèlerins sur leur passage. Nous nous asseyons ensuite au bord de la falaise pour observer le coucher de soleil...tout simplement magique ! Les jeux de lumière et la légère brume survolant les vallées environnantes produisent ensemble un effet féerique...

Le jour suivant, nous nous levons aux aurores pour voir le lever de soleil avant de partir en ballade jusqu’à un lac à quelques kilomètres de là. Une fois arrivées sur place, nous nous étendons sous une cahute quelques instants. Sur les bords du lac, une école primaire est en train de faire cours (il faut bien avouer que le cadre est idéal !) et, en tant que seules blanches perdues dans les environs, nous ne tardons pas à attirer leur attention. Finalement, au bout d’un moment, c’est le maître lui-même qui vient à notre rencontre. Nous discutons un moment avec lui avant de reprendre notre route. Le temps de faire quelques achats et nous embarquons dans le bus, pour un trajet encore plus charmant que le premier ! Première chose : nous sommes assises sur les sièges devant l’escalier, sans aucune barrière pour nous tenir, et le chauffeur ne cesse de donner des coups de frein secs. Bref, manquant de tomber toutes les deux minutes, il n’est pas très facile de dormir ! Seconde chose, pour rendre le tout plus amusant, une de nos voisines décide de vomir dans les dits escaliers, le chauffeur refusant toute halte pour laver les marches...une nuit merveilleuse ! 

Un jeune moine dans le temple du Dalaï-Lama
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