Femmes intouchables
(Inde, Slum Development Society) 

 

Les intouchables, un combat encore bien réel en Inde

Bien qu’aboli par la constitution en 1947, le système des castes continue bel et bien de diviser la société indienne. Que sont exactement les castes ? Il en existe quatre, divisées elles-mêmes en sous-catégories et qui définissent la hiérarchie de la société : les Brahmanes (prêtres), les Kshatriya (guerriers), les Vaishya (commerçants) et les Shudra (serviteurs). En dessous de toutes ces castes se trouvent les Dalits (intouchables, hors caste). Ce système des castes vient d’une conception hindouiste selon laquelle la naissance d’un individu dans une caste n’est jamais le fait du hasard. Elle résulte de l’harmonie de l’ordre cosmique et de la dignité de ses vies antérieures. Naître intouchable n’est donc pas scandaleux ou inacceptable puisque c’est conforme à l’ordre naturel. Si l’on accepte cet ordre et que l’on accomplit les rites adaptés à son rang social, on peut espérer se réincarner à un niveau supérieur. 

Avant 1950, les intouchables n’avaient même pas le droit de toucher l’ombre d’un individu de caste supérieure. Même si une telle règle n’est plus appliquée, le statut des intouchables ne s’est pas pour autant véritablement amélioré. Les métiers les plus ingrats leur restent réservés (en particulier le nettoyage des escréments). En 1999, alors qu’un représentant Dalit se présentait aux élections, 700 villages Dalits ont été brûlés. Régulièrement, des femmes sont assassinées ou violées par des hommes de caste supérieure. Or seulement 34% des cas sont suivis par la police, et souvent sont sans suite, de par l’influence des castes supérieures. La plupart des Dailits vivent dans les slums (bidonvilles) : des huttes qui menacent de s’effondrer à la moindre averse, deux toilettes publiques et payantes comme seule installation sanitaire pour pas moins de 8000 habitants, moins de 10 m2 pour une famille entière, tel est par exemple le paysage que nous offrent les bidonvilles de Chennai. Par manque de moyens de leurs parents, les jeunes intouchables sont obligés d’arrêter leurs études tôt pour travailler et contribuer au revenu familial. 

« Notre problème, c’est que nous ne possédons aucun journal, aucune télévision pour nous relayer. », Benjamin Diviyanathan (Slum Development Society)

Etre femme Dalit

Ainsi, être femme Dalit, c’est être les exclues des exclues. En effet, par nature et peu importe sa naissance, toute femme est, selon la religion hindoue, une hors caste et ce jusqu’à ce qu’elle épouse un homme dont elle rejoindra la caste pour intégrer le cycle des réincarnations. La pauvreté, l’endettement, le manque d’instruction, l’absence de planning familial, le manque d’infrastructures sanitaires, la violence des castes supérieures, etc. sont donc autant de causes qui placent plus particulièrement les femmes Dalits dans une situation d’urgence. 

Un certains nombre de jeunes filles Dalits sont également offertes aux temples pour y devenir prostituées: ce sont les Devadasis. Le statut des Devadasis, anciennement les "danseuses du temple", a beaucoup évolué au fil de l'histoire.Bien qu'interdit par la loi, cette pratique reste très courante. La fonction de devadasi est désormais réservée aux femmes intouchables ou de basses castes ; elles vivent souvent à part dans les villages. La contraception étant encore assez peu répandue, elles ont souvent plusieurs enfants, et peuvent par ailleurs contracter des maladies sexuellement transmissibles, notamment le HIV/Sida. Certaines ont encore des fonctions religieuses, mais cela n’est plus central dans leur quotidien. Elles sont données entre l'âge de 6 et 10 ans. A leur puberté, leur virginité est vendue à un homme qui peut éventuellement devenir un client régulier.  

La fonction de devadasi est désormais réservée aux femmes intouchables ou de basses castes ; elles vivent souvent à part dans les villages. La contraception étant encore assez peu répandue, elles ont souvent 3 ou 4 enfants, et peuvent par ailleurs contracter des maladies sexuellement transmissibles, notamment le HIV/Sida. Certaines ont encore des fonctions religieuses, mais cela n’est plus central dans leur quotidien.

Les femmes intouchables refusent leur situation et se battent pour que les générations à venir ne connaissent pas le même sort.

 « Pour moi c’est trop tard, mais je ferai tout pour que mon enfant, si j’en ai un, puisse avoir une vie heureuse, lui. Je travaillerai dix fois plus dur s’il le faut, mais jamais mon enfant ne vivra dans une hutte ni n’abandonnera ses études comme cela a été mon cas. », Saranya, 18 ans, Dailit.

La Slum Development Society

Lui-même intouchable (« Dalit »), Benjamin Diviyanathan a décidé en 1987 de monter une ONG pour défendre le droit des Dalits et appuyer le développement économique de cette population. Benjamin se bat depuis la création de SDS pour faire connaître le sort des Dalits. Il publie des rapports, contacte les médias internationaux, a créé un site Internet d’information sur les intouchables...Un travail sans relâche pour rallier le public à sa cause. SDS mène également un grand nombre d’actions sur le terrain (formations, création d’activités économiques...), en particulier auprès des femmes, notamment un projet de « Self Help Groups » (groupes d’auto-assistance) visant à la formation et à la création d’une activité économique pour des femmes intouchables handicapées ou malades. La SDS est là pour se faire leur relai, leur voix et plaidoyer leur cause au niveau international. 

Toutefois, l’ONG reçoit de moins en moins de fonds qui lui sont pourtant indispensables à la mise en place de l’ensemble de ces activités, comme nous l’explique Benjamin :

« La plupart des fondations qui nous soutenaient auparavant nous répondent aujourd’hui que l’Inde n’est plus une priorité par rapport à d’autres pays comme les pays africains. Parce que le pays connaît un fort développement économique, beaucoup pensent que nous ne sommes plus en situation d’urgence. Pourtant, vous voyez bien ici que c’est le cas. »

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